C’est un fait, l’urgence environnementale et sanitaire engendre des mutations profondes dans l’ensemble des secteurs économiques. C’est notamment le cas du secteur agroalimentaire, poussé en cela par les médias, les associations, les tiers de confiance et les consommateurs – 83% des consommateurs veulent privilégier les produits d’entreprises qui tiennent compte du développement durable (Enquête internationale 8000 itws). Incidemment, la « Transition alimentaire » a des répercutions significatives sur le Mix marketing.
Cela est d’autant plus vrai pour le packaging. Hier encore, carte d’identité des produits et ambassadeur de la marque, il se retrouve aujourd’hui sur la sellette. On parle de lui comme d’un détritus toxique pour la planète en oubliant toutes ses fonctions de transport, de conservation, d’information et d’usage.
Autre sujet sensible : le design du packaging. Disons-le, composer avec les nouveaux codes (Bio, Origine France, Nutriscore, Bleu Blanc Cœur, Pavillon France, ou encore Vergers responsables…) qui s’ajoutent aux règles ancestrales de création relève de la gageure.
L’avènement des achats raisonnés
Bien sûr, les leviers d’achat du plaisir, du prix ou de l’achat par automatisme dominent toujours ; Bien sûr encore, la part des produits vertueux achetés reste minime. Mais la montée en puissance des motivations rationnelles et des achats raisonnés est inexorable. Pourquoi cela ? D’une part, les consommateurs prennent conscience que leurs achats ont un impact déterminant sur l’environnement entre autre, d’autre part les applications jouent un rôle prépondérant dans l’éducation que nous sommes en train d’acquérir en matière d’alimentation. Cette pédagogie, va faire muter notre plaisir : Exit la gourmandise seule, nous trouverons notre plaisir à acheter bon mais impérativement sain, responsable et durable…
Mais pour l’heure, il est très difficile de communiquer efficacement sur le pack, car en matière d’engagements vertueux nous en sommes au stade d’apprentissage : qu’est ce qui est vraiment sain, vertueux et profitable pour tous ? Par ailleurs l’impact des engagements n’est pas stabilisé. Il fluctue au gré de l’actualité médiatique et des scandales sanitaires.
Les fondamentaux du packaging
Afin de garder le cap dans cette mer agitée, commençons par rappeler les postulats historiques de performances du pack :
- Générer de la « Désirabilité » : en 1er lieu, le contenant doit signifier une appétence du contenu. Le packaging doit créer une émotion qui guidera notre désir de possession,
- Être compris instantanément : le pack doit être pédagogue : définir le produit, suggérer les bénéfices de consommation, décrire le mode et le temps de préparation, plus récemment enfin, rassurer sur la sécurité inhérente à sa consommation,
- Respecter les codes de la catégorie : Le packaging d’une nouvelle offre doit suggérer la nouveauté, donc la différence. Toutefois, si différence il y a vis-à-vis des concurrents, toute la complexité réside à souligner « en même temps » son appartenance à la catégorie,
- Connaitre le plan de lecture d’un packaging : tout démarre au centre pour comprendre de quoi il s’agit. Puis l’œil circule en suivant la trajectoire d’un triangle : en haut au centre (La marque), sur les côtés droit et gauche (Engagements, réassurances, mode de préparation), enfin, le plus souvent, en bas au centre (Recette, bénéfice, grammage ou encore baseline). Doit-on rappeler que tout cela se fait en 1 à 3 secondes Chrono ?
- Rénover pas à pas : véritable nœud gordien ! Actuellement tout plaide en faveur de l’activation de la fonction « Reset ». Or pour un produit actuel, en particulier quand les performances sont bonnes, mieux vaut changer un pack par petites touches afin de ne pas déstabiliser les Shoppers.
Se poser les bonnes questions
Conséquence de cette complexité accrue, en amont des tests, nous observons des créations packaging parfois surprenantes qui traduisent la difficulté des agences à intégrer tous les paramètres. Aussi, voici quelques exercices pragmatiques observés chez les porteurs de projet lors de la rédaction d’un brief agence. Tout d’abord, prendre du temps pour se mettre les idées au clair et se demander :
- « Quelle est l’essence de mon produit ? » Saurez-vous écrire en une phrase courte sa définition ?
- « Quelle est mon Unique Selling Proposition ? » Le bénéfice différenciant que les consommateurs seront prêts à payer,
- « Quel est l’engagement qui sera la 1ère réassurance de nature à emporter la décision auprès des Shoppers ? »
Mais encore le nom, le dos de pack, les pictos et autres partis pris…
Héritage des décennies précédentes, on cherche spontanément un nom court et impactant pour une innovation. Les jeux de mot et les connotations anglosaxonnes sont souvent recherchées. Mais il est important que le Shopper comprenne ce qu’on lui propose. Mieux vaut opter pour une proposition descriptive plutôt qu’elliptique.
Par ailleurs, les créations packaging doivent porter sur le facing mais aussi sur les autres faces. En effet, le dos de pack, parent pauvre, est amené à prendre de l’importance avec la montée en puissance des réassurances. Il convient d’être clair sur les informations qui sont pertinentes sur chaque face.
L’image sera toujours supérieure aux mots car sa compréhension est immédiate. Aussi, mieux vaut se doter d’une banque de pictos stylisés pour signifier des informations utiles aux shoppers.
Enfin, en amont des tests packaging, il convient d’insister auprès de son agence pour avoir des pistes aux partis pris radicaux et différenciés. Cela offre aussi le bénéfice de mieux comprendre les mécanismes d’adhésion et de rejet des consommateurs. Et pourquoi ne pas vous offrir une piste pack épurée en guise d’outsider ? Le minimalisme est perçu comme plus sain et plus naturel par les consommateurs.
Concernant les sujets RSE, attention au retour de bâton
Avant de communiquer des engagements vertueux sur les packs, mieux vaut y réfléchir à deux fois, surtout si dans l’offre en question subsiste quelques zones d’amélioration. Certains consommateurs ont « La main lourde » sur les réseaux et sur leur application favorite. Ils ne sont plus prêts à entendre que le verre est à moitié plein. Bien des marques sont victimes de Bashing en retour d’initiatives vertueuses sur lesquelles elles avaient travaillé.
Autre pratique à effet boomerang : les produits « Sans… » gagnent du terrain. Dans nos tests il y a 3 à 4 ans, tout indiquait que les mentions telles que « Sans antibiotique », « Sans Nitrite » ou encore « Sans résidus de pesticide » n’auraient pas de halo négatif sur l’offre « conventionnelle ». Quelques années plus tard, on observe une montée en puissance de l’anxiété des consommateurs sur ces sujets. On peut se demander jusqu’à quel point nous avons créé ces craintes.
Mais pour combien de temps encore ces règles seront-elles pertinentes ?
Toutes ces règles valent pour un « terrain de jeu » identique : le libre-service des grandes surfaces alimentaires. Mais les autres circuits gagnent du terrain et avec elles d’autres règles s’imposeront : le commerce en ligne mais aussi les circuits courts, la restauration hors foyer, sans parler du retour en grâce du commerce traditionnel « Néo-vintage ».
Ironie de l’histoire, c’est dans le passé que nous allons puiser les idées de notre avenir avec l’avènement du Vrac qui monte en puissance dans l’univers agroalimentaire. Les commerces dédiés, les circuits spécialisés et même les grandes surfaces classiques : les initiatives en matière de Vrac font florès. On peut comprendre que les marques historiques du libre-service soient réticentes à franchir le pas : en effet, quel modèle économique proposer face à une telle offre ? Pourtant, des initiatives sont prises : des grandes marques s’associent à des sites tels que LOOP. Le principe consiste à commander en ligne ses produits favoris qui sont ensuite conditionnés et livrés dans des emballages spécialement conçus pour être réutilisés, moyennant le paiement d’une consigne. Doit-on dire ? « Le roi – Packaging jetable – est mort, vive le roi -Packaging durable »
OA